« En cette période estivale, L’Œil Sourd, collectif de renom aux multiples ressources et divers attributs vous propose ce cybercarnet. Véritable outil de propagande contemporaine, le blog est effectivement un moyen des plus sûrs pour parvenir à nouer un semblant de contact avec une audience peu regardante. Toujours est-il, L’Œil Sourd, habituellement voué à l’édition discographique, aux représentations auditives, s’adonne à la composition de ce journal de bord promis à une rapide autodestruction (ou presque). »

lundi 25 juillet 2011

>>> L'Œil Sourd de France



Enfin ! Je ne passerai plus l’après-midi cramponné à mon écran Samsung, détournant ma cervelle de croulantes obligations : aujourd’hui, le grand tour est conclus. Fini les gladiateurs de la bicyclette chevauchant leurs engins à vive allure ! Les as du vélocipède à la conquête des vertigineux cols ! Les maillots rouge, jaune, vert, blanc, à pois ! Les dossards ! Sans parler des chutes. Ah ! Le plaisir de la chute est tel, je pousse des cris, rien de si merveilleux que le cycliste en bouillie. Je guette en permanence le virage humide, le spectateur trop près du bord, le cabot prêt à déguerpir ou le conducteur maladroit. Les descentes ! Les descentes à plus de cent en vélo… Il faut bien l’avouer : cette édition a largement favorisé mon vice. Je tire mon chapeau à ce néerlandais qui exécuta un salto avant/avant de retomber dans les barbelés et trente-trois points de suture. De tels instants tragi-comiques justifient à eux seuls l’invention du téléviseur. Merci !






Cependant, où est la grande époque ? Un australien mi-poupon, mi-aborigène, a remporté la compétition ; 15 % des coureurs ont abandonné avant la fin ; le premier français est quatrième ; etc. Ce genre d’informations ne suffit plus à ma boulimie du deux roues. Il manque le grain de folie, le moment où le champion perd les pédales, tout est plus calculé, les produits ne sont plus les mêmes, voilà le problème ! C’est sûr, on ne reverra plus un héros à la Tom Simpson, mort au guidon, zigzaguant assoiffé, le maillot plein d’amphétamines sur les pentes du mont Ventoux. Le véritable amateur de sport ne peut être que nostalgique du faciès de camé à lunettes d’un Laurent Fignon (en haut) ou des narines en aspirateurs à coke d’un Pantani. Même Lance Armstrong savait y faire, lui qui avait flirté de si près avec la mort, dormant vingt heures par jour pour récupérer d’un cancer avant de se métamorphoser en figure christique déroulant les kilomètres surhumainement. 






Qu’importe les contrôles et décisions juridiques, la drogue est partie intégrante du cyclisme depuis le XIXe siècle, elle fait la beauté de la discipline. L’interdire, c’est empêcher l’athlète de se transcender, de devenir un demi-dieu échappé du peloton grâce à quelques doses risquées. Comme je hais l’individu qui renie son idole après un contrôle positif ! Mais, bien heureusement, encore aujourd’hui, la tolérance est de mise pour garantir un minimum de spectacle. Le patrimoine du Tour de France est sauvegardé par ses protagonistes. Il reste quelque peu artistique, à la quête d’une esthétique du dépassement de l’organisme de façon quasi-magique. Ô Passion du mois de juillet ! Vivement une équipe « L’Œil Sourd » !


(Pour approfondir votre lecture, vous pouvez écouter en dernière position du lecteur à droite, la chanson des Glasses traitant du sujet sous un tout autre angle)

Air Wick




4 commentaires:

  1. Lecture fortement conseillée: LE SURMALE d'Alfred Jarry.

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  2. Lecture très vivement conseillée aussi : tout Philippe Muray.

    L'aseptisation/pourrissement de tout, du sport à la télé, du cinéma aux magazines, de photoshop à Macdo, est le pire paradoxe de notre temps et du coup rien n'a plus de putain de saveur.

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  3. Un membre de ma famille a fini 3 fois 2ème d’une Etape du tour. C’était en 1965, 1967 et 1968, si mes souvenirs sont bons. Faire 298 km entre Lyon et Auxerre pour finir 2ème à exactement 2 secondes du vainqueur, sans jamais avoir les honneurs, ce sport est fabuleux. Je suis un inconditionnel de cette discipline. Alors « oui » pour une Team L’Oeil Sourd et un autre grand « Oui» pour ce billet.

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